samedi 18 mars 2017

Dernière journée au Sénégal et retour

Nganda def pour une dernière fois! C’est toujours François au clavier!

Pour bien débuter notre dernière journée au Sénégal, on a repris une formule gagnante, soit le déjeuner sur la terrasse en regardant la mer! C’est le genre de moment où tu te dis: « Wow, on est en mars et je regarde tranquillement la mer en déjeunant en pyjamas… il y a pire que ça dans la vie! » Ne nous jalousez pas trop vite, rappelez-vous qu’on avait encore tous les deux le rhume, même si notre condition s’améliorait lentement! Pour votre information, oui, le gars qui faisait ses push ups bizarrement sur la plage la veille était toujours au rendez-vous ce jour-là!

Après avoir ramassé nos affaires, on a dit adieu aux falaises et aux plages de Toubab Dialaw puis on a traversé le village vers la « gare routière » locale (qui n’était guère plus qu’un endroit où attendaient 2 ou 3 voitures déglinguées au croisement de deux rues). Ce matin-là, notre objectif était de revenir à Dakar. Malheureusement, impossible d’y aller directement, on devait changer à Rufisque, en banlieue de la capitale. Évidemment, dès qu’on s’est pointés à la gare, les quelques quidams qui chillaient là nous ont tout de suite demandé où on allait, et nous ont ensuite aidé à prendre le bon taxi collectif vers Rufisque! On le redit, mais les Sénégalais sont vraiment chaleureux! Le trajet vers Rufisque a été relativement rapide, et la voiture nous a laissé en plein centre-ville. De là, on comptait prendre un bus vers le croisement Keur Massar, d’où on en prendrait un autre pour se rendre chez Marilyse et Erwan. Encore une fois, de bons samaritains nous ont aidé à prendre le bon minibus!

Paranthèse: il n’y a rien qui amène d’emblée le touriste à Rufisque (d’autant plus que la ville est sillonnée de canaux fétides remplis de détritus). Cela dit, la ville possède encore de bien jolis immeubles coloniaux, en décrépitude avancée malheureusement. Encore une fois, comme à St-Louis, le jour où quelqu’un prendra l’initiative de retaper le vieux centre-ville (et de nettoyer les canaux), il y aura certainement du potentiel...

Bien entendu, les deux bus que nous avons pris par la suite étaient bondés, et, comme d’habitude, nous étions les seuls toubabs passagers! Cette situation n’avait pas échappé à un vendeur de cure-dents ambulant (étonnant fond de commerce), qui a bien essayé de nous vendre avec insistance ses bouts de bois une fois à bord du bus! Comme on refusait poliment, le gars a lancé à la cantonnade quelque chose en wolof qui a fait bien sourire les autres passagers! Ah, le touriste, cet éternel dindon de la farce! :) Cela dit, le fait d’être le seul étranger à bord avait aussi ses avantages. De fait, la jeune maman assise à côté de moi était tout heureuse de dire à son bébé « regarde le toubab, dis bonjour au toubab »! Le petit bonhomme semblait à la fois fasciné et apeuré par ma couleur de peau, si bien qu’il me regardait avec des gros yeux sans oser me faire des tatas, malgré mon grand sourire! 

Le trajet a été étonnement plus court que prévu (on était dimanche et la circulation n’était pas trop intense), et on est arrivés chez Marilyse et Erwan un peu après l’heure du dîner. C’est avec plaisir qu’on a retrouvé Antoine, Mattéo, Erwan et… Marilyse, revenue la veille de sa mission au Cameroun! Ça s’était bien passé, et ça lui a permis de voir trois différences avec le Sénégal: 1) au Cameroun, c’est pas mal plus vert qu’au Sénégal 2) il y a des montagnes là-bas!!! et 3) les gens sont moins sympathiques qu’ici! Ne serait-ce que pour les gens, le Sénégal est effectivement une destination parfaite pour découvrir l’Afrique!

On a joué un moment avec les enfants. Mattéo était tout content de revoir « tigresse » (Marie-Pascale) et « Papa tigre » (moi), dans le cadre de son jeu où on devait imiter une famille de tigres, initié à Lompoul. En tout cas, Mémé-tigresse a depuis un nouveau surnom bien amusant haha! Après, c’était l’heure de la sieste et on en a profité pour prendre l’apéro avec Marilyse et Erwan dans leur magnifique jardin plein de fleurs (et aussi pour se baigner dans leur piscine). Notre après-midi s’est donc étiré en douceur, à discuter entre amis…  La belle vie!

Quand les enfants se sont réveillés, on a commencé à planifier notre souper et on s’est dits qu’il nous fallait, avant de partir, essayer un must sénégalais: la dibiterie. La dibiterie, c’est un peu l’équivalent local d’un St-Hubert: c’est un endroit où on fait griller ou rôtir de la viande qu’on a au préalable débitée en morceaux (d’où « dibiterie »). Il y en a partout dans le pays. Comme nous sommes en terres musulmanes, la viande en question, c’est du poulet et de l’agneau. Ça vient évidemment avec les immanquables accompagnements de frites, salades, sauces et riz. Coup de chance, tout près de chez Marilyse et Erwan se trouvait une dibiterie ayant une excellente réputation. « Il faut bien choisir sa dibiterie! » nous avait en effet mis en garde Siasia au début de notre périple au Sénégal! À force de voir de nombreuses dibiteries peu invitantes lors de nos déplacements, disons que c’est en effet nécessaire de ne pas manger n’importe où!

On a donc pris un repas à emporter et on a dégusté le tout chez Marilyse et Erwan! Le poulet et l’agneau étaient délicieux, et la salade était inexplicablement piquante! On s’est régalés, et il en restait encore pour une armée par la suite! Les enfants ont ensuite eu droit à un spécial: une soirée « Mouk », leur dessin animé préféré (de petits animaux qui découvrent la planète en vélo, tout comme eux découvrent le Sénégal en fait!)! Ils ont donc couru pour aller l’écouter à la télévision, pendant qu’on continuait à jaser en bas. Puis, inévitablement, est arrivé le moment où on a dû faire nos sacs et se préparer à partir pour notre vol de retour, qui quittait Dakar à 23h30. Alors qu’Erwan tentait de coucher les enfants, ceux-ci ont bien compris qu’il se tramait quelque chose… Erwan est revenu nous voir en rigolant en nous disant: «  Mattéo m’a dit de vous dire qu’il allait être très triste que vous partiez » Mattéo est ensuite lui-même venu nous donner un coquillage en souvenir en nous redisant qu’il ne voulait pas qu’on parte… Et quand est venu le moment des adieux, les deux enfants étaient en pleurs! Impossible de ne pas avoir le coeur brisé! On se reverra au Québec!

Après avoir dit au revoir à Marilyse, Erwan est venu nous reconduire à l’aéroport. Merci encore pour tout chers amis!! On était 2 heures d’avance avant notre vol, soit un délai respectable avant de prendre l’avion. Évidemment, on n’allait pas s’en tirer à si bon compte! On a eu la joie d’expérimenter l’inefficacité à son meilleur, avec des files interminables pour passer les douanes et la sécurité… On a bien dû attendre 1h30 pour ces deux formalités!  Bien entendu, il y avait gens qui dépassaient allègrement, toubabs comme Sénégalais… On en revient toujours à ça: considères-tu vraiment que ta petite personne est si importante que tu peux te permettre de dépasser les autres, qui sont aussi écoeurés que toi d’attendre? Ahlalala… Un malheur n’arrivant jamais seul, c’est à ce moment que l’état général de Mémé a commencé à se détériorer gravement… Elle se sentait déjà un peu moins bien durant la soirée, mais là, elle faisait carrément de la fièvre, les courbatures avaient repris, et elle avait un mal de tête épouvantable!… Disons qu’elle combattait une vilaine bactérie sénégalaise, qui ne l’a pas lâchée jusqu’à son retour au Québec et même après…

Un préposé sénégalais d’Air France nous a souhaité un bon voyage avec un grand sourire, et c’est la dernière impression qu’on a eu du pays avant de le quitter: celle d’un endroit habité par des gens hyper accueillants! Au revoir Sénégal! Une fois à bord, la dame assise à côté de nous nous a raconté qu’elle avait dû écourter d’urgence ses vacances en Casamance pour revenir en France car son frère était décédé… Tu parles d’un mauvais coup du sort! Puis, on l’a changé de siège, ce qui a fait en sorte que nous avions la rangée de 3 bancs pour nous tous seuls! Ce fut un léger baume pour Marie-Pascale, qui a pu dormir un peu mieux pendant les cinq heures de vol...

C’est assez crevés que nous sommes arrivés à Paris, où il pleuvait à boire debout et faisait froid. On avait initialement l’intention de sortir un peu en ville durant notre escale de 7h, mais vu l’état de Marie-Pascale et le mauvais temps, on s’est finalement dit qu’on allait plutôt s’installer quelque part pour dormir un peu. Pour une raison mystérieuse, ce n’était vraiment pas clair auquel des terminaux nous devions nous rendre, et nos billets mal imprimés au Sénégal ne scannaient nulle part. Les préposées nous ont envoyé un peu n’importe où, ce qui m’a rendu un peu maussade, la fatigue aidant. Finalement, on a trouvé le bon terminal et - coup de chance - on a découvert des genre de chaises longues pas trop loin de notre porte d’embarquement! On s’est donc installés et on a dormi 4 bonnes heures assez confortablement. Chapeau à l’aéroport Charles-De Gaulle d’avoir pensé aux voyageurs exténués en transit en installant ce genre de bancs pour dormir!

Après cette sieste, on a erré un peu dans le terminal. On a notamment découvert qu’il y avait un mini-musée gratuit exposant des toiles originales de Picasso! Un musée à l’aéroport: quelle bonne idée! Les voyageurs sont souvent désoeuvrés avant de prendre leur avion, et l’aéroport ne leur offre généralement que des boutiques ou des restaurants pour tromper leur ennui. Bonne initiative d’introduire un peu d’art et de culture dans cet univers autrement purement consumériste!

Enfin, on a pris notre vol de retour avec Montréal, en compagnie de jeunes adolescents québécois visiblement de retour d’un voyage scolaire en France. Le vol a été sans histoire, Mémé a dormi de tout son soûl, la nourriture était toujours aussi bonne (la même qu’à l’aller par contre) et on est arrivés vers la fin de l’après-midi à Montréal. Malgré nos sacs pleins de jus de baobab et de bissap, on n’a eu aucun problème aux douanes et on a pris le bus 747 vers le centre-ville. On prenait en fait un lift Amigo Express vers Québec à partir de Berri-UQAM, car on travaillait les deux le lendemain! Eh oui, pas de répit! On commençait par contre à regretter cet arrangement un peu intense, car l’état de Marie-Pascale allait de mal en pis avec de la diarrhée qui commençait. En attendant à la place Dupuis, le moral était au plus bas pour elle, et ça n’a été guère mieux pendant les 2h30 de trajet vers Québec… On n’était pas fâchés de revenir à la maison pour une nuit de sommeil bien méritée!

Ainsi se termine notre virée sénégalaise! Merci encore de nous avoir suivis et de nous avoir laissé des commentaires, on adore ça!

Épilogue:

Dans la semaine qui a suivi notre retour, alors que mon rhume disparaissait, les symptômes de Marie-Pascale s’aggravaient progressivement… Elle a annulé sa journée de travail du mardi pour aller à l’hôpital (pensant qu’elle faisait une malaria) et a rencontré l’infectiologue le lendemain. Son état s’améliorait peu mais elle continuait à travailler car elle n’avait plus de journées de congé en banque à cause du voyage, jusqu’à ce que le vendredi soir suivant notre retour, une brusque poussée de fièvre qui ne retombait pas nous oblige à aller à l’urgence! Inutile de vous dire qu’avec les mots clés « retour d’Afrique » et « forte fièvre », elle est passé au triage en un temps record et a été confinée dans la chambre d’isolement par crainte qu’elle n’ait quelque chose de contagieux! Elle est finalement restée une nuit en observation, au cours de laquelle on lui a administré beaucoup de soluté (elle était fortement déshydratée) et plusieurs doses d’antibiotiques. Elle a eu son congé l’après-midi du lendemain. Diagnostic: un mélange probable d’un virus assez agressif et d’une septicémie à campylobacter (en français: une belle infection digestive d’origine bactérienne, l’équivalent d’une salmonelle). Rassurez-vous, elle a été ensuite complètement remise. On a été malades quelques fois en voyage, mais c’est la première fois que l’état de l’un d’entre nous nécessite une hospitalisation! Au moins ça a eu lieu au Québec! Ce sont les risques du métier…

Au plaisir de vous revoir dans un prochain blog!

samedi 11 mars 2017

La petite côte

Salut! C’est toujours François!

En se réveillant après une bonne nuit de sommeil, on a tout de suite senti que cette journée s’annonçait meilleure pour nos malaises respectifs! Disons que le sirop contre la toux avait eu un effet bénéfique sur la gorge de Marie-Pascale!

On a débuté la journée de manière glorieuse, en mangeant un gruau sur la terrasse face à la mer… Outre le fait que le paysage était loin d’être moche, ça nous a aussi permis d’observer l’activité matinale sur la plage. Le gars qui faisait ses push-ups dans le sable était de loin le plus intéressant. En fait, il avait creusé un trou dans le sable pour que l’exercice soit plus intense, mais il avait une drôle de technique pour s'entraîner. Pour tout vous dire, on avait l’impression bizarre qu’il était en train de faire l’amour avec la plage! En tout cas!

La région du Sénégal où nous nous trouvions, la Petite Côte, s’étend environ du sud de Dakar à Joal-Fadiouth et est peut-être la plus touristique du pays. C’est là que se concentrent les meilleures plages du pays. On y trouve de gros resorts style « tout inclus » un peu insipides vers la ville de Saly, mais aussi des coins plus épargnés par le tourisme de masse, comme Toubab Dialaw (là où on restait). Et il y a aussi des attractions originales comme la réserve de Bandia et Accrobaobab, qui étaient tous deux au programme de notre journée!

Le transport en commun pour se rendre à la réserve de Bandia et à Accrobaobab depuis Toubab Dialaw étant hautement complexe, on s’était résolus à réserver un taxi pour la journée, qui allait nous attendre le temps qu’on fasse ces deux visites. En entrant dans l’auto, le gars s’est mis à nous débiter quelque chose sans qu’on puisse comprendre quoi que ce soit. Oh boy, toute la journée à ne pas pouvoir communiquer avec notre chauffeur, ça s’annonçait bien! Difficile par contre de déterminer si le dude nous parlait en wolof (chose étonnante avec deux toubabs visiblement pas du coin) ou alors en français avec un accent épouvantable. Au bout d’un moment, un peu abasourdis, on lui a demandé s’il parlait français. « Oui » nous a-t-il répondu le plus calmement du monde, sur le ton de l'évidence. Et tout le reste de la journée, il a jasé avec nous dans un français parfaitement intelligible! Euh… En tout cas, on a pas trop compris, mais bon, des fois, les choses sont un peu mystérieuses en voyage…

Trente minutes plus tard, on était rendus à la réserve de Bandia! C’est une grande réserve naturelle où évoluent en toute liberté de nombreux animaux originaires du Sénégal, de même que quelques « ajouts » en provenance d’Afrique du Sud. Et on peut y faire des safaris! Bon, ce n’est pas le Kenya ou la Tanzanie, mais quand même, c’était tout de même notre premier safari en Afrique!

Sur place, on a fraternisé avec 2 Français avec qui on a partagé le pick-up ouvert pour le safari, question de limiter les coûts. Ils étaient bien sympathiques et l’un d’entre eux avait lui aussi attrapé le rhume. Yé, un autre! « Je pensais être la seule personne à avoir trouvé le moyen de m’enrhumer dans toute l’Afrique de l’Ouest, mais vous me faites sentir moins seul! » nous a-t-il lancé! Il travaillait dans le développement et voyageait fréquemment au Sénégal et ailleurs dans la région. « Les infrastructures sont bonnes au Sénégal » nous a-t-il assuré, provoquant notre étonnement. « L’autre jour, en Guinée, j’ai mis 24h pour faire 400km. Ici, en comparaison, c’est le rêve! Il y a de l’asphalte! » 24h pour faire 400km??? On parle d’une vitesse moyenne de 17 km/h!!! Et nous qui trouvions que les infrastructures au Sénégal laissaient à désirer! Comme dit le proverbe: quand on se compare, on se console!

Et c’était parti pour un safari de 2h! Le cadre était enchanteur, avec sa belle savane exempte de déchets (un gros plus) et parsemée d'immenses baobabs et d’acacias épineux. On a d’abord fait un arrêt à l’enclos des hyènes, question d’observer ce prédateur tacheté typique d’Afrique. Il y en a apparement à l’état sauvage au Sénégal, notamment dans le delta du Siné-Saloum! C’est en tout cas ce que notre guide nous avait dit lors de notre tour de pirogue! Pour l’instant par contre, l’animal, gros comme un berger allemand, n’avait pas l’air bien méchant, bien occupé à roupiller dans sa cage… Ils le gardent en captivité pour éviter qu’il ne bouffe les autres animaux de la réserve, qui sont tous herbivores!

On a ensuite vu plein d’antilopes, d’élans et d’autruches, qui vivent tous naturellement au Sénégal. Mais l’excitation a commencé à grimper quand on a vu deux masses grises au loin: des rhinocéros! OK, ils sont importés d’Afrique du Sud, mais on a quand même pu s’en approcher à moins de deux mètres! C’est immense ces machins-là! On dirait un tank gris avec un corne! Ils broutaient tranquillement en compagnie de phacochères, des genre de sangliers sénégalais… Impressionnant!

Quelques minutes plus tard, j’ai bien cru que Mémé allait exploser de bonheur quand on a fait irruption au sein du troupeau de girafes (là encore importées d’Afrique du Sud)! Ce n’était plus ma blonde mais une petite fille de 4 ans au sourire béat qui était assise à côté de moi! Il faut dire qu’il y avait quelque chose de magique à regarder ces animaux, à la fois magnifiques et bizarres, se nourrir tranquillement à la cime des arbres pendant que nous les regardions! C’est énorme comme machin ça aussi! On restés un bon moment avant de croiser quelques zèbres (sud-africains eux aussi)! On pensait que ça allait être à peu près de la grosseur d’un cheval, mais en fait, c’est un peu plus petit un zèbre. Ça a davantage le calibre d’un âne!

Les rhinos, les girafes et les zèbres ont pas mal été les moments forts de notre visite à Bandia, qu’on a adoré! On a aussi vu plein d’oiseaux et de petits singes. Vers la fin, on a fait un arrêt à un gros baobab. C’est là qu’on a appris que, contrairement aux apparences, le baobab n’a rien d’un bois dur… Avec une clé par exemple, on peut ainsi facilement y forer un trou! D’ailleurs, beaucoup de baobabs portent des marquent circulaires sur leur tronc. C’est que, traditionnellement, les habitants y grimpent en s’aidant de bâtons, qu’ils piquent dans l’écorce molle!  En fait, selon les Sénégalais, le baobab fait partie de la famille des herbes et non des arbres. On ne peut rien faire avec ce bois-là, mais c’est dans les baobabs creux que plusieurs ethnies du Sénégal avaient l’habitude d’enterrer certains de leurs morts importants. Un tronc creux pouvait aussi servir de cachette à des familles lors de crises, et, lors des sécheresses, la sève du baobab étaient consommée en guise d’eau. Bref, à défaut de jouer un rôle économique, le baobab avait néanmoins d’autres fonctions utiles!

On a fini notre visite par la mare aux crocodiles, qui jouxte le restaurant du parc. « On leur donne à manger les restants du resto, ils adorent ça! » À voir les panses dodues des reptiles, je n’avais pas de misère à croire qu’ils profitaient bien de cette manne!

Comme on avait faim, on s’est arrêtés pour manger au resto de la réserve. Bon c’était plus chic et plus cher que d’habitude, mais combien de fois dans une vie peut-on déguster un burger d’antilope et des brochettes de zébu? Verdict? Délicieux, en particulier le hamburger! Notre repas a néanmoins été interrompu par la témérité d’un singe, qui a réussi à piquer l’un des pains dans notre corbeille! Ça, c’est le mauvais côté de mettre un resto dans un endroit où il y a des singes en liberté… Évidemment, c’est là où convergent tous ces démons poilus, qui passent leurs journées à utiliser leur habileté légendaire pour subtiliser de la bouffe aux touristes! Les gens rient de bon coeur (sauf quand ils sont pas traumatisés parce qu’un singe vient de leur arracher leur pointe de pizza des mains), mais les serveurs sont exaspérés! En plus, c’est brillant ces bestioles-là! On les a vu faire une attaque concertée contre la cuisine en plein air, mais celle-ci a été contrée par la vigilance des cuistots qui les ont chassés juste à temps haha!

Entre deux quintes de toux pas possible de Marie-Pascale, on a rejoint notre chauffeur de taxi et on a quitté la réserve de Bandia, où on avait vraiment eu un bon moment. Direction: Accrobaobab! Accrobaobab est la version sénégalaise du parcours d’Arbre en arbre, qui consiste en différents circuits d’hébertisme suspendus entre les arbres. À la différence du Québec, par contre, on circule ici entre les baobabs! L’animateur qui nous accompagnait tout au long était vraiment hyper enthousiaste. Il a commencé par nous expliquer comment fonctionnait l’équipement, puis nous a intimé l’ordre de grimper à l’un des baobabs pour débuter le parcours! On était à environ 15m dans les airs, il faisait super chaud, et la première étape consistait à relier l’autre baobab sur un fil de fer d’une vingtaine de mètres. « Embarquez sur le petit banc! » nous a dit notre animateur, désignant le bout de bois trop branlant à notre goût et s’avançait dangereusement dans le vide! Disons que c’était un peu plus intense qu’Arbre en arbre, où le niveau de difficulté est progressif! Ici, boum, on entre directement dans les choses sérieuses, sans transition!

On a réussi à faire plusieurs stations (parfois avec plus de difficultés en ce qui me concerne: je ne suis pas particulièrement habile…) avant d’arriver au clou d’Accrobaobab: la pirogue volante! On s’est installés tous les deux dans le bateau, puis on a glissé sur une tyrolienne pendant une 20aine de mètres haha! On a ensuite continué le parcours jusqu’à la dernière attraction: la longue tyrolienne qui nous ramenait sur la terre ferme, où on a calé notre 1,5L d'eau! Pour terminer, il y avait aussi un exercice d’escalade sur un gros baobab, activité qu’on a misérablement échoué: seule Mémé a atteint le premier palier!

Bref, une attraction bien intéressante et pleine de sensations fortes, mais on est quand même un peu restés sur notre faim… Le parcours était au final assez court, et peut-être un brin trop intense au début!

De retour à Toubab Dialaw, on a pris la fin de l’après-midi vraiment relax, à l’image des milliers de chats qui peuplent la cour de notre hôtel ! Soit dit en passant, l’hôtel où on logeait, l’Espace Sobo-Badé, est un endroit plutôt funky. Niché au sommet de falaises ocres surplombant la mer, c’est un ensemble de bâtiments en faïence et en briques, avec une vibe artistique (beaucoup de sculptures, spectacles de musique) tirant vaguement vers le nouvel âge (on peut y faire du yoga, on trouve des posters avec des slogans bouddhistes sur les murs)… Ce n’est pas kitsch pour autant et c’est un très bel endroit, même si on se serait attendu à un peu plus pour les chambres compte tenu de l’extravagance de l’endroit!

J’ai été m’amuser un peu dans les vagues, même si l’eau était bien froide, puis on s’est installés et on a passé au moins une heure à écrire le blog, peinards, face à la mer. Au soleil couchant, on a été se promener un peu sur la plage. Ici, impossible de ne pas remarquer que le soccer est le sport national: il devait y avoir six ou sept games de soccer qui se jouaient sur la plage lors de notre balade! Et les joueurs étaient de très bon niveau! En revenant, des gens dansaient près de l’hôtel au rythme des djembés, dans le cadre de l’une des nombreuses activités culturelles organisées par Sobo-Badé! Un peu plus loin, il y avait un vieux Français un peu weird, en speedo, qui dansait en transe près d’un feu avec deux Sénégalais tout en marquant le rythme en frappant avec un bâton sur une bouteille de plastique. Il nous a fait un sourire entendu quand on est passé à côté de lui!  Pourquoi pas? Ah, vivre et laisser vivre, c’est la clé!

Pour souper, on s’est régalés d’un excellent curry au poisson (pour moi) et d’un spaghetti aux fruits de mer (pour Mémé). Et on a terminé la soirée en allant demander à la réception un seau d’eau chaude, question qu’on puisse se laver! Ah oui, parce qu’ici, on se lave à l’eau froide! Pas de problème en pleine journée, il fait tellement chaud, mais le soir, ça baisse à 22 avec du vent, et c’est pas mal plus frais! Le seau d’eau chaude est alors bienvenu!

On vous laisse sur une délicieuse tournure de phrase sénégalaise! Désormais, ne dites plus « j’ai la diarrhée ». Dites plutôt: « j’ai le rhume des fesses »! Haha!

À bientôt!

François

lundi 6 mars 2017

Joal-Fadiouth

Salut! C'est François!

En se levant cette journée-là, Marie-Pascale avait toujours aussi mal à la gorge après avoir toussé toute la nuit et moi j'avais le nez qui coulait comme un érable au printemps! On faisait une belle paire d'éclopés!

Après un agréable petit déjeuner, on a quitté à regret le Bazouk du Saloum avec la pirogue de 10h... Sincèrement, c'est une superbe adresse dans un cadre naturel étonnant, et on y serait bien restés une nuit de plus. Avis aux intéressés! En guise d'au revoir, on a pu revoir de nombreux oiseaux nichés dans la mangrove tout au long du trajet en bateau qui nous ramenait à N'Dangane... Cette fois, c'est au village de pêcheur de N'dangane Sambou qu'on débarquait, car c'est là que se trouvaient les véhicules pouvant nous amener vers notre prochaine destination, Joal-Fadiouth.

Après avoir acheté le nécessaire pour survivre au voyage (i.e. de l'eau et les merveilleuses pastilles sénégalaises Valda contre le mal de gorge - 40 cennes le paquet!), on a négocié le prix de notre course et on est partis avec deux autres backpackers en taxi-brousse. Vous l'aurez deviné: un taxi-brousse, c'est un taxi collectif dont la spécialité est de desservir des localités un peu isolées, reliées entre elles par des pistes. Et il portait bien son nom, car la route entre N'dangane et Joal-Fadiouth n'était guère plus qu'une track de 4-roues un peu aplanie qui zigzaguait à travers la savane! Ce qui nous a évidemment permis de voir de très jolis paysages de brousse de même que quelques villages égrenés le long du chemin. C'était, disons, des villages rustiques: la plupart des habitations étaient des huttes de boue séchée avec un toit en paille (on appelle ça des cases ici)! En tant qu'Occidentaux, on a souvent  beaucoup d'idées préconçues de ce qu'est l'Afrique, tout comme par exemple certains Européens croient que les tipis et les igloos sont monnaie courante au Québec. Beaucoup de ces stéréotypes ne correspondent pas à la réalité, mais il y en a au moins 2 qui sont véridiques au Sénégal: le fait qu'il y a vraiment des villages de huttes de pailles et le fait que les femmes qui transportent toutes sortes d'objets invraisemblables sur leur tête!

Après un certain moment, près d'un village, un gendarme a contraint notre chauffeur à s'arrêter. Sans stress aucun, ce dernier s'est alors dirigé vers la voiture de patrouille, y est resté 2 secondes puis on est repartis. "Tu leur files un billet, et voilà!" de répondre notre chauffeur devant nos airs interrogatifs. La corruption est bien présente dans ce pays! 

On est finalement arrivés à Joal, un gros bourg en bord de mer, non sans avoir au préalable essuyé une véritable tempête de poussière aux abords de la ville! Heureusement, notre chauffeur nous confirmé que ce n'était pas toujours comme ça! En entrant en ville, on traverse une vaste plaine jonchée de détritus. Une pancarte bien dérisoire indique qu'il est désormais formellement interdit d'y jeter des ordures, mais disons que le mal est déjà fait...

Après avoir laissé les 2 backpackers français à la gare routière (les premiers qu'on rencontre dans le voyage), notre taxi-brousse s'est transformé en "clando" pour aller nous reconduire à Fadiouth, un peu plus loin. Un "clando", c'est un taxi clandestin qui pallie au manque de transport en commun dans certaines villes mal desservies comme Joal. Et il en rentre du monde! À un moment, on était 4 sur la banquette arrière, et 3 sur le siège passager à l'avant (dont un bébé)! 

Le chauffeur nous a laissé au bout de la route, là où se trouve Fadiouth. On a pris les services d'un guide (obligatoire pour les touristes), puis on est partis explorer cette curiosité sénégalaise. Fadiouth est en fait une île habitée située dans la mangrove. Jusque là, rien de bien nouveau. Néanmoins, il s'agit d'une île artificielle constituée uniquement de... coquillages! En effet, depuis le 4e siècle, les ancêtres des habitants actuels ont commencé à pêcher, consommer et entasser des coques là où se trouve aujourd'hui  Fadiouth. Au fil des siècles, l'île a grossi pour donner naissance au site qui existe aujourd'hui. Celui-ci repose sur des tonnes et des tonnes de coquillages empilés pendant plus de 1500 ans! Et on en ajoute continuellement. Un peu hallucinant!

On accède à l'île via une longue passerelle de bois. Sur place, l'île en tant que telle est divisée en petits quartiers possédant tous leur saint patron. Car, contrairement au reste du Sénégal, l'île est à 90% catholique. Musulmans et chrétiens coexistent néanmoins dans une grande harmonie, les premiers ayant notamment mis la main à la pâte pour construire l'église de l'île aux côtés de leurs frères catholiques. Au milieu de l'île se trouve également un énorme baobab sacré. Ici, tant musulmans que chrétiens sont aussi un peu animistes et entretiennent le culte des ancêtres symbolisé ici par l'arbre en question. Les gens du coin vivent de la récolte des coques et des huitres, et cultivent également le sorgho dans des champs voisins. Anciennement, leur sorgho séchait dans des petits greniers à mil en paille disséminés dans la mangrove, limitant ainsi les dégâts causés feux et les rats!

Non contents d'avoir créé une île de coquillage pour héberger leurs semblables, les habitants en ont au fil du temps créé une seconde pour leurs morts. L'île-cimetière de Fadiouth, également constituée de coquillages, consiste en plusieurs monticules d'une blancheur immaculée couverts de croix et parsemée de baobabs. C'est vraiment un magnifique endroit. Les musulmans sont enterrés à côté des chrétiens, perpétuant dans la mort la coexistence pacifique qui a été la leur dans la vie. À méditer!

On a terminé la visite par un passage par l'endroit où sont conservés les animaux. Le cochon s'ajoutait à l'habituel cocktail vaches-chèvres-ânes-poulets, christianisme oblige! Puis, on a laissé notre gentil guide pour aller diner dans le seul resto de l'île. On y a mangé les meilleures brochettes de lotte du voyage de même qu'un désormais classique yassa poulet. Le diner nous a requinqués un peu, car en raison de nos virus respectifs, ce n'était pas la grande forme...

De retour sur la terre ferme, on a pris un autre "clando" vers le "garage", le nom que les Sénégalais donnent aux gares routières. On se rendait à Toubab Dialaw, près de Dakar, et on a attendu un bon moment que notre sept-places ne se remplisse. Il faut dire qu'on était à l'heure de la prière, et qu'il n'y avait pas foule! Pendant ce temps, on a tué le temps en jasant avec Ahmed, un pêcheur de Casamance de passage à Joal visiblement intrigué par les toubabs en sacs à dos que nous étions!

Enfin, on est partis. Même si la voiture était en meilleur état que celle qui nous a amené de St-Louis à Dakar, il faisait tout de même affreusement chaud, nous étions bien poisseux et on avalait en masse de poussière! Le tout avec le rhume, c'était vraiment un mélange à tout casser! On n'était donc pas fâchés d'arriver, 2h plus tard, à une gare d'une village sans intérêt d'où on devait changer pour Toubab Dialaw, un petit bled en bord de mer où on allait dormir. Ce fut heureusement assez facile de trouver un clando pour nous y amener. Le gars était bien affable et se faisait un point d'honneur d'agir comme guide touristique en nous indiquant tout ce qu'il y avait sur la route! "Ça, c'est le lycée du village de Yene" "Ça c'est la résidence d'un ministre" etc., etc.!

Finalement, on est arrivés à l'Espace Sobo-Badé, un magnifique hôtel sis sur une falaise face à la mer où on allait passer deux nuits. On était claqués par le transport, et la toux de Mémé s'était à nouveau aggravée, emportant avec elle son moral (chose très grave quand on voyage avec elle, croyez-moi). On s'est donc mis en tête de trouver du sirop contre la toux à la pharmacie locale, opération qui fut étonnamment facile et qui donna par la suite d'excellents résultats! Sur le chemin, on en a profité pour acheter de l'eau glacée! Juste entre Joal et Toubab Dialaw, on avait calé à deux un 1,5L d'eau! 

Ensuite, on a regardé le coucher de soleil devant la mer, en mouchant et en toussant. Deux épaves dans un cadre enchanteur haha! On a soupé au resto de l'hôtel, où on a rencontré une bande de sympathiques jeunes Français qui avaient pris les Québécois en affection et étaient ravis de nous voir sortir des expressions bien de chez nous! On a agi en vrais toubabs en commandant des plats connus et réconfortants pour soigner notre rhume: un bon vieux spagat et des rouleaux impériaux aux légumes. On s'est donné le droit après près de deux semaines de bouffe presque exclusivement sénégalaise! On est ensuite tombés comme des bûches! 

Avant de vous quitter, voici quelques observations pêle-mêle sur le Sénégal!

- Ici, les gens se curent les dents partout avec des bouts de bois. Genre avec des morceaux de branche. C'est un peu bizarre pour les non-initiés de voir des gens dans la rue et dans l'autobus se gosser vigoureusement les dents avec du bois mort, et mâchonner ensuite longuement leur tige jusqu'à ce qu'il n'en reste qu'un chouia sans écorce.

- À Dakar, des coupeurs de cheveux ambulants annoncent leurs services dans la rue en faisant tinter leurs ciseaux!

- Les Sénégalais écrivent parfois "au son" en français, ce qui donne des résultats amusants. Des devantures de magasins annoncent ainsi du "poulè en soce" et des "chanduiches", par exemple!

- On a vu au moins deux terrains vagues portant l'inscription "ce terrain n'est pas à vendre" suivi d'un numéro de téléphone. On ne sait pas trop pourquoi le gars précise ses coordonnées. Question que les gens lui signalent leur intention de ne pas acheter le terrain?

- L'islam est très tolérant au Sénégal. Ça donne un mélange des genres étonnant, comme des femmes voilées affichant des décolletés plongeants ou portant des chandails bedaine!

- Pour les standards des pays en développement, les conducteurs sénégalais sont bien prudents sur les routes. Pas de dépassements débiles dans des courbes alors qu'un camion arrive en face, par exemple!

- Il y a un village au Sénégal qui s'appelle Pire. Le village voisin ne s'appelle pas Mieux par contre!

- Pour une raison qu'on ignore, les couchers de soleil ne sont pas francs au Sénégal. Le soleil baisse, descend, puis disparait dans une genre de brume. Il ne tombe pas dans la mer comme on pourrait s'y attendre. Des explications? 

- Ici, on lave les chèvres dans la mer! C'est une activité qui consiste à pousser une chèvre récalcitrante dans l'eau puis à l'arroser vigoureusement. Plaisir garanti! À ce sujet, Mattéo a fait récemment bien rire ses parents quand, dans son bain, il a arrosé son petit frère Antoine en lui disant "tu es ma chèvre"!

À bientôt!

dimanche 5 mars 2017

Delta du Sine-Saloum

Salut salut! C'est MP!

Cette journée-là, on s'est levés relativement tôt parce qu'on anticipait un peu notre deuxième série de transport en commun sénégalais. Après avoir joué un peu avec les garçons et attendu le chauffeur de taxi qui était en retard, on est partis avec eux et Fatou en direction de leur camp de jour, où ils allaient toute leur deuxième semaine de vacances. Amadou, avec son beau grand sourire, est le chauffeur de taxi presque désigné des 2 garçons. Comme il n'y a pas vraiment de transport scolaire, il vient chaque matin les chercher pour les amener à l'école avec Fatou puis ramène Fatou à la maison par la suite, où elle fait un peu de ménage avant de retourner les chercher en début d'après-midi. Heureusement que le taxi ne coûte pas trop cher, et que Fatou est là pour pouvoir le faire car à l'heure où l'école commence, Marilyse et Erwan sont déjà dans le centre-ville en train de travailler!

Parenthèse: alors qu'on roulait dans une rue étroite et que des badauds marchaient un peu trop près de l'auto à son goût, Amadou a roulé (lentement mais tout de même) de façon à accrocher la main de l'un d'entre eux avec son rétroviseur! "Je l'ai fait exprès, ils faut qu'ils dégagent la voie!" de nous répondre Amadou avec un grand sourire!

Après le stop au camp de jour, on a continué un peu plus loin dans la même direction avec Amadou, vers la gare de Pikine. On est peut-être devenus paresseux mais ça ne  nous tentait pas de revivre à nouveau le 2h que ça avait pris la veille pour s'y rendre en bus... Les indications qu'on avait eu la veille quand on était allés s'informer des "horaires" vers N'dangane, notre prochaine destination, étaient peu claires...
 - Le bus arrive à 8:00, il est prêt à 9:00. Donc arrivez vers 10:00 comme ça vous serez bons pour partir à 12:00!
 - Donc le bus part à 12:00?
 - Oui mais soyez-là à 10:00 pour être sûrs
 - Et qu'est-ce qu'on fait pendant 2 heures?
 - Vous vous installez, vous prenez ça relax...

Toujours est-il qu'on est arrivés à 10:30, où un "koxeur" excessivement collant nous a confirmé que le bus était à midi. Plutôt que de suivre son conseil et de s'installer déjà dans le bus, on a réussi à se débarrasser de lui après un certain temps et on est partis acheter de l'eau et des provisions pour la route. Notre ami scotch-tape nous a retrouvé pour nous dire que finalement, il y avait un minibus qui partait à l'instant! Hé bin...

Il était étonnamment vide, ça regardait bien! Mais ce fut un leurre, tout comme la prétention que c'était un bus direct. Arrêtant aux 2 coins de rue pour faire monter du monde, installer des armoires en pièces détachées et des ballots de foin sur le toit ou tout simplement pour ne rien faire de pertinent, on est devenus soudainement moins confortables. À deux sur un banc qui contiendrait normalement 1 personne et demi (ou un obèse?), avec quelqu'un assis dans l'allée, le backpack sous les pieds de François, une barre de métal au niveau de ma taille et de mon genou à droite, le trajet s'annonçait super! Sans compter que dans ce bus, les gens vargeaient sur la carlingue pour tout et pour rien! L'autobus est prêt à partir, blam blam blam! Quelqu'un veut descendre, blam blam blam! Pas reposant!

Nouveauté pour cette fois, j'avais sorti un masque chirurgical de notre trousse de santé excessivement bien garnie, question de protéger un peu ma gorge endolorie des nuages de poussières qui entraient dans le bus. On est ressortis sales, suants et découragés après un bon 5h de route dans le petit village de N'dangane campement, dans le delta du Sine Saloum.

On s'est effondrés dans notre hutte pour la nuit (très beau site mais hutte en manque d'amour) avant de se motiver à organiser notre tour en pirogue, l'attraction principale du Sine-Saloum. Siasia, le collègue de François rencontré à Dakar, nous avait conseillé un piroguier, qu'on a appelé et qui était justement disponible! On partait dans 30 minutes, nous laissant assez de temps pour aller acheter de l'eau et des pastilles pour la gorge afin que je réussisse à survivre à ce rhume/pharyngite du tonnerre. On s'est d'emblée fait aimer par les 2 Libanais qui tenaient le dépanneur quand François a pilé sur un d'entre eux qui était couché par terre pour la sieste!

Ibou, le piroguier, était un grand gaillard souriant, qui avait une petite entreprise de tourisme et qui militait pour l'environnement en faisant notamment des tournées dans les écoles pour éduquer les enfants! La visite a commencée par les bolongs, les petits bras de mer du delta. La végétation est composée uniquement de mangroves, qui peuvent atteindre 2 mètres de haut. Buissons denses, ils ont des milliers de racines qui plongent dans l'eau et qui retiennent la terre sur les îles. Comme c'était marée basse, on voyait bien les racines et les huîtres qui s'y accrochent! Il n'y avait vraiment pas beaucoup d'eau et on est de fait restés coincés dans un banc de sable à un certain moment! Mais ça nous permettait de voir la terre sur certaines îles, colonisées par des milliers de crabes (max 10 cm) rouges et violets, appelés crabes violonistes!

Ibou nous décrivait tous les oiseaux qu'on voyait: martin-pêcheurs, plusieurs types de hérons, aigrettes, aigles pêcheur, cormorans, et mes préférés les pélicans! C'est immense et ça a l'air tellement niaiseux! On avait fait un tour de bateau sur un lac au Monténégro pour voir des pélicans à 100 mètres; ici il y en a partout et on les voit à une 10aine de mètres! On a bifurqué vers l'île aux oiseaux, qu'on a suivie alors que le soleil descendait lentement. C'était un moment parfait pour le tour de pirogue parce que 1. il fait moins chaud, 2. les oiseaux sont plus actifs, 3. la luminosité est belle, 4. il y a moins de pirogues donc on a le delta à nous tout seul ou presque!

On est passés à côté de l'arbre sacré du coin, le seul et gigantesque baobab des bolongs, tout blanc grâce au guano des pélicans qui y ont élu domicile, ridiculement perchés sur les petites branches vu leur taille! Puis on est revenus à N'dangane, bien contents de notre visite! En effet, c'est probablement le plus beau delta qu'on ait vu (Mékong, Amazone, Parana, Danube), entre autre parce que c'est très vert et que l'eau n'est pas brune ici!

Après on a fait une petite marche dans le village pour toubab (le vrai village, N'dangane sambou, est un peu plus loin), où on s'est fait aborder plusieurs fois par une autre Fatou bien insistante: "Hey Marie, tu regardes mes chapeaux? Non? Hé bien tu vas brûler ma belle!". On a mangé dans un bon petit resto avec un thé à la menthe un peu trop astringent puis on est revenus au campement pour écrire un peu de blog.

La nuit n'a pas du tout été reposante, composée de quintes de toux à me faire croire que j'avais la tuberculose! Et François commençait à avoir un mal de gorge lui-aussi! Une douche froide m'a permis de me donner un peu d'énergie après la nuit presque blanche, alors qu'on quittait pour l'île de Mar Lodj pas très loin avec la navette-pirogue de l'hôtel. Endroit paradisiaque s'il en est un, où on aurait bien passé les 2 nuits s'il n'y avait pas eu le problème de réservation!

C'est un complexe de petites huttes, dispersées dans un jardin très bien tenu, devant un large bras du delta! Après avoir dîné au resto, on est allés se baigner dans une eau étonnamment chaude, une activité nécessaire vu la chaleur incroyable qu'il fait en après-midi ici! Puis on s'est installés sur des chaises longues à l'ombre pour lire des romans qu'ils avaient dans la "bibliothèque" de l'auberge, ce qu'on a fait tout l'après-midi jusqu'à ce qu'il fasse moins chaud. On a pris un kayak puis on est partis explorer les bolongs attenants! Il y avait moins de petits bras à explorer qu'on pensait mais le calme avec uniquement le bruit des oiseaux était très relaxant!

Avant le souper, on a discuté sur le quai devant le coucher du soleil avec une famille de Français au look aristocratique qui étaient ici depuis 6 mois pour le travail. Le poisson du souper était très bon, et encore plus lorsque dégusté dans le mignon jardin! On a regardé un peu les étoiles avant d'aller dormir au son des criquets!

samedi 4 mars 2017

Intermède - Une épopée en transport en commun entre St-Louis et Dakar

Salam aleikoum! C'est François!

Vous connaissez notre philosophie: pour bien tâter l'âme d'un pays, il faut prendre les transports en commun. Ça permet de vivre le quotidien des gens du coin tout en permettant des rencontres intéressantes. En prime, c'est toujours moins cher que le taxi ou la voiture. Évidemment, le confort et la rapidité ne sont pas toujours optimaux (voici un bel euphémisme), mais on a généralement la couenne dure et on arrive la plupart du temps à y voir du positif.

Je dois dire, par contre, que les déplacements en transport en commun au Sénégal sont particulièrement éreintants, même sur les grands axes routiers. Parmi les quelques comparatifs qu'on a pu faire avec nos voyages antérieurs, seuls nos 18h de route sur une piste en pleine jungle au Guyana et nos 8h de taxi collectif dans le désert du Kyzylkoum en Ouzbékistan "accotent" notre expérience sénégalaise en la matière.

Attachez votre tuque, donc: on s'embarque pour une journée de trajet entre St-Louis et Dakar! 

D'abord, on partait déjà avec une prise. Vous vous souvenez que j'avais  été pris de malaises gastriques dans le désert de Lompoul. Moi qui ne suis que rarement malade dans les voyages, voilà que je me suis réveillé en pleine nuit pour vomir. Avec les murs en céramique qui résonnaient et les feuilles de papier en guise de murs, j'ai bien dû réveiller tout l'hôtel! Je me suis rendormi par la suite et mes maux de ventre s'en sont trouvés grandement améliorés, mais il reste que j'étais quand même un peu faible pour le déjeuner le lendemain matin. Marie-Pascale, de son côté, avait toujours son mal de gorge carabiné, ce qui affectait grandement son moral. On formait donc un duo assez peu en forme pour affronter notre journée! 

Au déjeuner, on a questionné le gars de l'hôtel au look intellectuel avec ses lunettes et son intérêt pour l'opéra (c'est ce qui jouait en tout temps dans la salle à manger) pour savoir à quelle heure prendre le bus pour Dakar. "Vous voulez prendre le bus? Vous voulez vraiment arriver à 20h à Dakar? Non, prenez un sept-places!" Ah, ok alors. On va essayer ça! Avant, par contre, on avait toutes sortes de choses à organiser... Pour faire une histoire courte, on avait réservé deux nuits dans un établissement un peu plus tard dans le voyage, mais il y avait eu un problème dans la réservation et ils n'avaient de la place que pour une nuit. Il fallait donc trouver autre chose... Bref, on a passé une bonne demie-heure de gossage à tenter d'organiser nos choses avec comme toile de fond un Sénégalais qui hurlait au téléphone en wolof derrière nous! Tout pour tester notre patience!

Vers 11h45, on était enfin sortis de l'auberge (littéralement). Après un bref arrêt à la poste, on est ensuite passés acheter des provisions pour la route.

Et en route pour Dakar, quelque 200km plus au sud!

On a d'abord pris un minibus Tata vers la gare routière, évidemment située en banlieue de St-Louis. Trajet: 30 minutes, distance, à vol d'oiseau: environ 5km. On vous a déjà décrit ces minibus: disons qu'ils sont toujours bondés, qu'on est presque toujours debout et que le confort y est minimal. C'était le cas ici aussi!

Le minibus nous a débarqué au milieu de rien dans les faubourgs de St-Louis, où un Sénégalais nous a ensuite aiguillonné vers la gare routière, un bloc plus loin. Gare, c'est un bien grand mot: on aurait plutôt dit un grand stationnement plutôt sale et rempli d'épaves de voitures. Rapidement, on a été abordé par un "koxeur", le gars qui remplit les bus et les sept-places. "Vous voulez aller en sept-places à Dakar? Par ici!"

Et c'est là qu'on a fait connaissance avec les sept-places.  On s'imaginait qu'il s'agissait d'un vieux minivan: pas  de stress, on connait ce genre de véhicule. Erreur. Un sept-places, c'est plutôt une vieille voiture Peugeot complètement déglinguée, de forme allongée. Il y a un siège en avant avec le conducteur, puis suivent 2 rangées de 3 sièges. D'où les "sept places". En gros, un sept-places, c'est du covoiturage où tous les sièges sont occupés, y compris ceux du milieu. Super! Au moment d'entrer, les deux seuls sièges inoccupés étaient ceux du fond, à côté d'un autre Sénégalais heureusement pas très corpulent. Comme la carrosserie est un peu surélevée à cet endroit, on avait donc les genoux dans le front, tout en étant incapables de mouvoir nos jambes. Bonjour l'ankylose! Pour comble, juste en haut de la tête de Mémé se trouvait une structure en plastique à moitié détruite qui avait vraisemblablement abrité une radio il y a fort longtemps. À chaque cahot, sa tête heurtait donc le plastique brisé, l'obligeant donc à se contorsionner pour éviter cette situation désagréable. Le banc du milieu était en partie occupé par un couple de vieux Belges bien gentils, des habitués du Sénégal qui ont eu cette parole rassurante pour nous: "vous savez, on peut parfois mettre 6h pour faire cette route. C'est ce qui s'est passé pour nous à l'aller." Oh. God. 6h dans cette position??

Heureusement, nous n'avons mis "que" 4h30 pour faire le trajet vers les faubourgs de Dakar, ce qui, dans les circonstances, était plutôt efficace.Il faut dire que c'est là l'unique avantage des 7-places vis-à-vis des bus: comme ils ne s'arrêtent pas constamment pour faire monter et descendre des gens, ils vont donc plus vite. Cela dit, ce furent 4h30 assez difficiles. Outre notre inconfort évoqué ci-haut et les aléas de la route sénégalaise (circulation ralentie par de vieux camions, dos d'âne, etc.), il faut ajouter la chaleur qui nous rendait bien poisseux. Pour tenter de palier à ce problème (il n'y avait évidemment pas d'air climatisé), les fenêtres du véhicule étaient ouvertes dans la mesure du possible. Ce qui créait un autre problème, créé par le vent. En effet, l'air sec au Sénégal est plein de poussière. Les vitres ouvertes, on est donc rapidement couverts de cochonnerie (la crème solaire mêlée de sueur agit comme une excellente colle), sans compter les fumées noires des gaz d'échappement des vieux tacots qui nous précèdent et qu'on doit parfois respirer sur des centaines de mètres car il est impossible de les dépasser de manière sécuritaire. Et une fois arrivé près de Dakar, c'est le smog qui nous accueille.  Pour prolonger le plaisir, le chauffeur a évité l'autoroute (car payante) et a aussi cru bon se frayer un chemin dans les petites rues de la ville de Rufisque, en banlieue de Dakar, pour tenter d'éviter le trafic. Le tout évidemment agrémenté de bruits de moteurs parfois assourdissants et de musique africaine sur repeat! Au moins il y avait le paysage dépaysant... Cela dit, de la savane sur terrain plat pendant des heures, ça finit par devenir un peu redondant!

C'est donc les jambes en feu, le corps couvert de crasse et les poumons remplis de vapeurs de diesel qu'on a quitté sans regret le sept-places à la gare de Pikine, en banlieue de Dakar. Il était 17h15. De là, on devait se rendre dans une autre banlieue, les Almadies, où résident nos amis à Dakar. Coup de chance, un bus local, le 232, nous amenait près de l'aéroport, d'où on prendrait un autre bus pour le 5 km restant. Un gars super sympathique nous a aidé à trouver le 232 et, 20 minutes après notre arrivée à la gare, on repartait pour un trajet qu'on estimerait relativement court. C'était sans compter avec l'heure de pointe infernale de Dakar. Résultat: 2h15 de bouchons constants et de petites rues encombrées pour un maigre 15km de trajet. Au moins là on était assis confortablement, mais disons qu'une fois à l'aéroport, on en avait plus qu'assez des klaxons, de rouler à 2kmh et des effluves d'essence!

Enfin, on a pris le minibus 3 vers les Almadies (par chance pas trop bondé). On s'est cependant arrêté en chemin à la banque Bicis, question de retirer de l'argent au guichet le plus lent de la Terre (sérieusement, j'ai rarement vu un logiciel de guichet automatique réagir aussi peu promptement). Temps total: 5 minutes. Distance parcourue: environ 1km. Après avoir attendu une dizaine de minutes dans cet endroit inconnu avec l'équivalent de 1000$ dans les poches, on a repris le minibus 3 (bondé cette fois) pour environ 15 minutes jusqu'au rond-point Ngor. Mourants de faim et de fatigue, on a avisé un resto où on comptait  dévorer une salade, question de mettre un peu de verdure dans notre journée où on avait surtout consommé du pain blanc et un peu de fromage. Dans l'escalier menant au resto, on a cependant été retenu assez longtemps par un gars qui disait nous reconnaitre sachant qu'on marchait souvent dans le quartier, mais ses explications n'étaient pas très claires... Ce qui est sûr par contre, c'est que nos yeux suppliants hurlaient "Sérieux dude, c'est super ce que tu racontes, mais on sait pas trop t'es qui et on n'est pas trop d'humeur à discuter maintenant. Peux-tu juste nous laisser aller manger???"

Enfin, après 5 minutes de marche, on est revenus complètement fourbus chez Marilyse et Erwan, vers 20h15. On a jasé un bout avec Erwan avant de prendre une douche salvatrice et de tomber dans les bras de Morphée.  Temps total: environ 8h de transport porte à porte pour faire un peu plus de 200km!! À ce moment-là, notre moral était pas mal à plat. Devenons-nous plus sensibles à l'inconfort avec l'âge, ou est-ce que le Sénégal est réellement un pays où les transports e commun sont absolument épuisants? Probablement un mélange des deux! :)

Et on remet ça demain: départ vers Ndangane et le delta du Siné-Saloum!

À bientôt!

vendredi 3 mars 2017

Saint-Louis

Salut! C'est MP!

Outre le fait que j'avais l'impression d'être à l'article de la mort avec mes courbatures, mon mal de tête et ma gorge en feu, le trajet de bus a été étonnamment rapide, environ 2h pour 100 km! Il faut dire que l'autobus n'est pas le moyen de transport le plus efficace au Sénégal...

Arrivés à Saint-Louis, on a traversé à pied le pont qui rejoint le centre historique situé sur 2 îles, pont de métal de 500 mètres designé par Gustav Eiffel, qui donne de beaux points de vue sur la ville. Saint-Louis est une ville située sur l'embouchure du fleuve Sénégal, qui est devenue le centre commercial et administratif de la colonie française. Il y a donc de nombreux bâtiments à l'architecture coloniale, qui sont malheureusement presque tous délabrés... Ça reste quand même une ville qu'on pourrait qualifier de joliment décrépite! L'ambiance y est bien plus calme qu'à Dakar.

On a affronté pour la première fois (et pas la dernière!) l'intersection débilitante près de notre hôtel, auberge de jeunesse sur papier mais très loin d'avoir l'ambiance habituelle. Bon ce n'était pas trop mal mais c'était un peu aseptisé! J'y ai pris une douche salvatrice dans l'objectif de faire diminuer mon début de fièvre et j'ai dormi un peu pour reprendre des forces. Une recherche rapide de mes symptômes donnait le choix entre un début de malaria, de dengue, de chikungunya, de maladie du sommeil ou d'un bête influenza. Heureusement, l'incubation et la présentation clinique ne fittaient pas parfaitement avec les 4 premiers...!

On est ressortis pour aller grignoter quelque chose de léger dans une boulangerie-pâtisserie et on est revenus à l'hôtel pour se coucher tôt! Malheureusement, la nuit n'a pas été fort réparatrice pour personne avec mes mouvements incessants pour trouver une position confortable malgré l'impression que je venais de courir deux marathons... Ah et il y a aussi eu les chèvres toute la nuit et les muezzins à 6:30 du matin. Probablement parce qu'on est plus proches de la Mauritanie, il y a une quantité impressionnante de mosquées à Saint-Louis et on dirait qu'ils font l'appel à la prière 20 fois par jour. Dépendamment du muezzin, c'est vraiment beau, sauf à 6:30 du matin quand on a mal dormi!

Après le déjeuner rudimentaire de pain blanc et de confiture (standard au Sénégal d'après ce qu'on a pu constater), on est lentement partis explorer la ville. Première étape: sortir de l'argent, parce que le guichet la veille n'avait plus d'argent. Même s'il était presque midi, ils n'en avaient toujours pas remis. On a donc traversé le pont pour aller voir l'autre guichet de la même compagnie (qui a une entente avec Tangerine pour limiter les frais): temporairement hors d'usage dû à une absence de réseau. Le gardien nous a donné une réponse honnête par rapport à quand le service allait revenir: "peut-être dans pas longtemps, peut-être dans beaucoup de temps"!

Cette visite de l'autre côté du pont nous a permis de voir un autre côté que le Saint-Louis "touristique". Il y avait un marché, avec des odeurs nauséabondes de poissons et fruits de mer, beaucoup de charrettes, et, pour ajouter au dépaysement, quelques Mauritaniens avec leurs habits touaregs (large foulard sur la tête et autour du cou, avec une longue tunique)! Superbe!

Il nous restait quand même assez d'argent pour la journée donc on est allés dîner dans une crêperie tenue par un Béninois sympathique! On a débuté notre visite officielle par le sud de l'île, à tendance plus catholique avec sa grosse cathédrale coloniale plus ou moins en état elle aussi. L'architecture coloniale se sent encore sur les rues principales de Saint-Louis, avec des bâtiments colorés/pastels avec des balcons au deuxième étage. Certains sont devancés par des grands buissons avec des fleurs roses ou oranges, ce qui nous fait dire que une fois rénovée, cette ville, une beauté qui s'ignore, pourrait devenir une deuxième Carthagène!

Certaines sections sont plus classiquement africaines, le tout fait vraiment joli avec des petites ruelles partout et les enfants qui jouent au soccer dans la rue! Entre les deux îles allongées, il y a le stationnement des pirogues, collées les unes sur les autres à perte de vue! Elles sont toutes colorées et celles qui vont en haute mer sont quand même grosses (environ 10 mètres). Elles vont par paire pour celles qui font la pêche au filet: on les reconnaît avec leurs mêmes dessins et les mêmes drapeaux au devant!

Pas trop loin de la place centrale, la place Faidherbe (pas tant extraordinaire), on s'est fait aborder par Moctar, un pêcheur fin cinquantaine, qui voulait savoir comment on aimait le Sénégal. On s'est arrêtés un peu (sinon les gens sont vexés) et on a finalement jasé longuement. Il nous a parlé de son métier de pêcheur (il part plusieurs jours de suite en mer, à dormir sur des bancs en bois dans la pirogue!), à quel point c'était un métier difficile et que la majorité de l'argent allait au patron qui possédait les pirogues. Il nous a aussi raconté qu'il avait fuit sur une pirogue clandestine en 2002 pour entrer illégalement en Espagne. Ils étaient 98 initialement et il en est resté 34 à la fin. Comme le trajet a duré 12 jours plutôt que 7, il a manqué d'eau et de nourriture et les gens ont dû boire leur urine, sans compter la maladie qui s'est déclenchée dans le bateau... Ils ont été secourus par La Croix Rouge, qui leur a donné des soins (et sauvé la vie) et se sont faits arrêter par la police espagnole. Après quelques jours, où ils se faisaient passer pour des habitants de pays en guerre dans le but d'avoir le statut de réfugiés, la police leur a proposé que s'ils disaient la vérité, ils leurs permettaient de rester et de se trouver du travail. C'était faux, et ils ont été mis sur l'avion suivant, menottés jusqu'à Dakar... Quelle histoire! Et dire que la même chose arrive encore aujourd'hui avec la crise des migrants en Méditerranée...

Puis on a jasé de tout et de rien, avant de le remercier pour la conversation et qu'il nous demande finalement de l'argent... Évidemment , toujours l'argent. On vous avoue qu'on a vraiment cru que ce gars ne nous avait pas raconté tout ça afin qu'on lui donne quelque chose... Après une 30aine de pays visités, on ne sait toujours pas comment réagir à ça et ça fait qu'on a moins envie d'avoir des conversations avec les habitants, par anticipation que ça va mener à un malaise...

On a marché vers le nord de l'île en philosophant sur le sujet puis on est revenus à l'hôtel pour que je me repose un peu pendant que François tentait un jus local, le jus de gingembre: piquant et astringent comme un alcool fort!

Puis on est allés voir une des attractions saint-louisiennes: le retour au port des bateaux de pêche! Activité économique numéro 1 de la ville, il y  a un village de pêcheurs sur la deuxième longue île. Y habitent 20 000 personnes sur un territoire de 300 mètres carrés! C'est la même densité de population qu'à Calcutta paraît-il! Et on peut en effet y voir des airs d'Inde, même si on y est jamais allés... C'est probablement dans les quartiers les plus pauvres qu'on ait vus jusqu'à présent et c'était noir de monde! Beaucoup d'enfants, qui nous disaient bonjour comme si on était une vraie attraction, des calèches-taxis, des animaux, des déchets, des maisons minuscules en tôle... Étourdissant! On a marché le long de la rue principale, d'où partent des ruelles parallèles et on se sentait vraiment dans un autre monde! Autant on avait l'impression de ne pas y avoir notre place (on disait Salam aleykoum à tout le monde pour dissiper notre malaise) qu'on se sentait quand même en sécurité. C'était un spectacle euphorisant que j'aurais du mal à vous décrire!

Arrivés à la section industrielle après une 20aine de minutes de marche, on a bifurqué vers la plage en passant par un entrepôt/étal couvert où ils font je ne sais quoi avec les poissons mais ça ne sentait pas la rose... Puis il y avait des pirogues sur la plage et on s'est rendus proche de l'eau pour voir le déchargement des bateaux. On a probablement manqué le moment précis où ça arrive mais on en a vu quelques unes! La pirogue s'échoue sur le sable et ils sortent les caisses en styromousse qui contiennent les poissons, les trient selon les espèces, et là un tapon de personnes arrive et ils gesticulent en négociant des prix pour amener les poissons chez eux (?) ou à des camions. Il y avait quand même de l'agitation sur la plage, dont des femmes assises dans le sable qui retiraient les écailles des poissons. Bien sûr, on s'est fait aborder par quelques Sénégalais mais ce qui différait cette fois était que la majorité d'entre eux ne parlaient que peu français! Preuve que le Wolof est la langue maternelle et que le français est appris ensuite à l'école!

On a marché un peu plus loin jusqu'au cimetières des pêcheurs, dans lequel on a pas pu entrer soit parce que j'étais une femme, soit parce que je n'étais pas assez bien habillée? On a pas tout compris en Wolof... Toujours est-il qu'on est partis en revenant par une rue défoncée qui donnait devant les pirogues à quai, se faisant courir après par des enfants qui nous touchaient ou voulaient jouer avec le sac.

En éternels optimistes (qui commençaient à manquer de fonds), on est revenus à la banque... qui ne fonctionnait toujours pas! Pourtant, on nous avait "assuré" que le technicien allait venir durant l'après-midi... Hé bin, l'adage d'Erwan comme quoi on y arrive jamais du premier coup au Sénégal était vrai encore une fois! On nous a conseillé d'aller à celle l'autre bord du pont, qui marchait semblait-il. La petite marche sur le pont au soleil couchant était bien belle, mais le guichet ne marchait toujours pas, of course! "On nous a conseillé d'aller à celle l'autre bord du pont". Ouais c'est ça, on va aller chez un concurrent à la place. Honnêtement, depuis le début du voyage, je pense que sortir de l'argent fonctionne 1 fois sur 4! Imaginez le tollé si tous les guichets d'une banque chez nous ne fonctionnaient pas pendant quelques heures! Ici c'est la norme!

On a terminé notre journée en mangeant un couscous et du jus de bissap puis on est revenus à l'hôtel pour reprendre des forces!